Commentaire de l'ordonnance du Conseil d'Etat sur le burkini




Le Conseil d’Etat a estimé que l’arrêté contre le burkini qui lui avait été soumis, pouvait être jugé dans le cadre d’un référé-liberté, et qu’il violait des libertés fondamentales.

Il serait urgent de permettre à une femme de mettre à la plage une tenue signifiant son adhésion à la loi islamique, aussi urgent par exemple, que de sortir de prison une personne retenue sans base légale.

On a avancé l’hypothèse que cette ordonnance aurait été prise pour ne pas statuer à chaud sur une situation posant un problème de fond.

Je suis en désaccord et avec cette ordonnance et avec la raison ainsi proposée.

Voici pourquoi.


Je lis le détail de l'ordonnance du Conseil d'Etat et elle me parait d'autant plus scandaleuse qu'elle affirme l'urgence de statuer sur ces arrêtés. Or il n'y avait aucun urgence à statuer sur ces arrêtés. .. sauf à considerer que la liberté religieuse est une urgence absolue et ce sans qu'il soit besoin de connaitre du contenu du message religieux véhiculé par les actes d'exercice de cette liberté.
Le seul sens  de cette ordonnance est donc celui là. Et je suis totalement en désaccord avec.

Il repose sur une vision des faits totalement erronée. Decoulant la faute très très grave des magistrats consistant à ne pas vouloir connaitre du contenu des textes religieux pour interpréter les actes commis au nom de la liberté religieuse.

Le juge des référés auraient du se dire incompetent et renvoyer, pour un examen approfondi et à froid , au juge du fond, l'examen de la légalité de ces arrêtés.

L'ordonnance considére qu'il y a, du seul fait de l'interdit d'une tenue "atteinte grave à la la liberte d'aller et venir, liberte de conscience et liberté personnelle" et donc URGENCE à l'empêcher ...

Ce faisant il prend la responsabilité de trancher sur le fond une question des plus épineuses, .. pour la seule raison que des personnes, qui ne sont nullement interdites d'aller et venir, mais uniquement de le faire dans une certaine tenue, qui ne sont nullement entravées dans leur liberté de conscience (car si leur conscience leur interdit la plage, nul de les oblige s'y rendre), seraient empêcher d'arborer un signe dont la sens politique a deja été estimé des plus contraire en soi à l'ordre public.

J'ajoute que si urgence il y a, elle consiste plutôt dans la protection des femmes non voilées, qui d'ores et déja craignent de fréquenter certains quartiers en France, et le craindront encore plus à la suite de cette ordonnance.

Le communiqué du Conseil d'Etat, parlant de " référé liberté" et d'atteinte à une liberté fondamentale à empecher d'URGENCE confirme le sens de cette décision, scandaleuse. Il n'y avait aucune urgence à trancher le débat de la légalité de ces arrêtés.

Ou alors il fallait indemniser Xavier Dor pour atteinte à la liberté de conscience de manifester son opinion pour un droit fondamental a la vie humaine en donnant des chaussons à une femme risquant selon lui sous un bref delai de commettre l'irreparable :situation urgente ô combien elle aussi ...


En fait, les auteurs de l'ordonnance, soit n'ont jamais consulté le moindre ouvrage de droit comparé soit mentent délibérément.
Quand on lit dans le rapport Tuot, un des signataires de l'ordonnance, à la fois que l'islam dans ses différents courant est méconnu et que l'"islamisme" voudrait imposer ses lois divines, ce qui fait comprendre au lecteur :
que l'auteur connait bien l'islam
que l'islam vrai ne vise pas à imposer ses lois divines aux sociétés,
alors on tire la conclusion que je donne, ( à moins d'envisager une lecture radicalement différente des manuels de droit comparés ...) deux possibilités seulement, et dans les deux cas, à mon sens une faute très grave.
Rapport Tuot
Page 62 et suivantes

Historiquement, le voile a été utilisé comme moyen de jihad dans les pays musulmans a partir des années 70, à la grande surprise de nombre de musulmans "libéraux" eux mêmes, qui ont commencé par le combattre au nom de l'égalité des sexes d'ailleurs dans les pays musulmans. Voir des voiles à Alger avant paraissait à beaucoup inimaginable, les gens de gauche là bas pensaient que c'était impossible, la video de Nasser et tous ses spectateurs, explosant de rire à l'idee que l'on puisse demander d'imposer le voile aux femmes, est significatif. Mais pour diverses raisons, dont notre politique économique et étrangere, néo colonialiste, le jihad a repris vigueur.

En très peu d'année le voile comme signe identitaire et de politique religieuse a pris de l'ampleur ( des iraniennes de gauche l'ont mis sottement et s'en sont amerement repentie) et ceci partout sur la planete. En France c'est dans les années 80 que le probleme éclate.

Cela fait 30 ans que le probleme est apparu en France. 30 ans. Les magistrats n'ont pas statué " à chaud" sur cette question.

Lors de l'affaire Kherroua, en 1996, il y a 20 ans, le commissaire du gouvernement s'insurgeait devant le Conseil d'Etat contre la these consistant à dire que les juges ne devraient pas statuer sur les questions de sens d'actes se revendiquant "religieux", et rappellait que le rôle essentiel du juge necessite de donner du sens, et il parlait du sens de la svatiska.
Mais le choix du Conseil d'Etat est toujours de refuser de chercher le sens du signe que représente le voile dans ses variantes. Et en ceci, dans cette abstention, le Conseil d'Etat fait preuve d'irresponsabilité par ignorance volontaire. en fait il fait pire, il décide délibérément de refuser de juger dans les conditions nécessaires pour le faire.

Je trouve immense, je dis bien immense, la responsabilité de ceux de mes coreligionnaires qui martèlent aux juges, je l'ai entendu en direct dans un proces, que "critiquer le coran ça me rappelle les propos sur le talmud", faisant ainsi croire aux juges que s'ils osaient seulement se pencher sur la "théologie" islamique, ils seraient responsables d'une prochaine destruction des musulmans d'europe - je pense que ces intellectuels et militants juifs ont effectivement un impact sur l'état d'esprit de nos magistrats.

Si l'on ignore le sens du voile selon le fiqh, alors effectivement, restreindre son port signifie uniquement restreinte une tenue de "croyance" religieuse, de morale sexuelle ou autre opinion ou sentiment personnel, et alors il n'y a pas plus de raison de l'interdire que d'interdire l'exhibition de tenue sm ou de string affriolant, et de plus, cela signifie pretendre defendre la laicite en s'en prenant uniquement aux femmes.

Mais le Conseil d'Etat, saisi de la question de ce sens depuis 1989, ne peut, sans se moquer du monde, pretendre ignorer qu'il devrait prendre connaissance des éléments lui permettant de rechercher ce sens, tel qu'il est donné par les personnes se désignant comme musulmanes de differents courants.

Je cite le commissaire du gouvernement :
 " Nous ne comprenons pas, comme d'ailleurs de nombreux commentateurs, ce refus de principe de donner un sens au port d'un insigne dont le motif serait religieux. Donner du sens est ce que fait tous les jours un juge, un sens à un mot, une parole, un sens à un comportement, et cela est dans la nature même de l'acte de juger. Pourquoi la circonstance qu'un insigne soit qualifié de religieux ou même soit clairement tel suffirait-elle pour faire obstacle, par principe, à une recherche de signification, recherche qui est une opération de qualification juridique et qui est donc encore du droit, qui est purement du droit ?
Vous êtes donc tout à fait fondés à chercher, et à dire le cas échéant, ce que signifie un symbole religieux, ce qu'il signifie pour ceux qui l'arborent et ce qu'il signifie pour ceux qui le perçoivent (et découvrir éventuellement ce qui s'avance masqué derrière les apparences du religieux).
II est quand même étonnant que l'on puisse trouver assez de sens à un insigne pour le tenir pour religieux mais pas assez pour connaître ce qu'il exprime !
Et ne nous dit-on pas par ailleurs que bien évidemment il ne saurait être question d'admettre des insignes qui porteraient, par le seul fait d'être portés, par eux-mêmes en quelque sorte (ce "par eux-mêmes" cheville de tous ces raisonnements) qui porteraient atteinte aux grands principes.
Fort bien mais cela suppose de donner un minimum de sens à ces insignes et quelle attitude adopter devant les sectateurs du soleil soutenant que la svastika tournant dans le bon sens n'est qu'un symbole solaire, ou devant eux qui arborant une croix celtique feraient valoir que cette forme de la croix n'est pour eux que le support privilégié de l'art irlandais des entrelacs.
II faudrait bien alors accepter de donner un sens aux choses. Pour ce qui nous concerne, nous nous reconnaissons ce droit et pour ce qui est de l'insigne religieux aujourd'hui en cause nous soutiendrons qu'il a au moins trois significations
• la signification d'un acte, non de prosélytisme, mais de pression sur les correligionnaires ou supposées telles de celles qui arborent ce foulard;
• une signification politique;
• et la signification de l'affirmation par celles qui le portent d'un système de valeurs incompatibles avec l'ordre public au sens précédemment exposé."



26 août 2016

CE, ordonnance du 26 août 2016, Ligue des droits de l'homme et autres - association de défense des droits de l'homme collectif contre l'islamophobie en France

Nos 402742, 402777
Vu les procédures suivantes :
I - La Ligue des droits de l’homme, M. Hervé Lavisse et M. Henri Rossi, ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, d’ordonner la suspension de l’exécution des dispositions du 4.3 de l’article 4 de l’arrêté du 5 août 2016 du maire de la commune de Villeneuve-Loubet portant règlement de police, de sécurité et d'exploitation des plages concédées par l'Etat à la commune de Villeneuve-Loubet. Par une ordonnance n° 1603508 et 1603523 du 22 août 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté leurs demandes.
Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 23 et 25 août 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la Ligue des droits de l’homme, M. Hervé Lavisse et M. Henri Rossi, demandent au juge des référés du Conseil d’Etat, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de faire droit à leur demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils sont recevables à solliciter la suspension de l’exécution de l’arrêté contesté ;
- la condition d’urgence est remplie dès lors que, d’une part, l’arrêté préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation des requérants ainsi qu’aux intérêts qu’ils entendent défendre, d’autre part, l’appel a été formé dans les plus brefs délais et, enfin, l’arrêté contesté a vocation à produire ses effets jusqu’au 15 septembre 2016 ;
- l’arrêté contesté porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de manifester ses convictions religieuses, à la liberté de se vêtir dans l’espace public et à la liberté d’aller et de venir ;
- il ne repose sur aucun fondement juridique pertinent;
- la restriction apportée aux libertés n’est pas justifiée par des circonstances particulières locales.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 24 et 25 août 2016, le maire de la commune de Villeneuve-Loubet conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d’urgence n’est pas remplie et que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
II - L’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, d’ordonner la suspension de l’exécution du 4.3 de l’article 4.3 du même arrêté du 5 août 2016 du maire de la commune de Villeneuve-Loubet. Par une ordonnance n° 1603508 et 1603523 du 22 août 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Par une requête enregistrée le 24 août 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, l’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France demande au juge des référés du Conseil d’Etat, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de faire droit à sa demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle est recevable à solliciter la suspension de l’exécution de l’arrêté contesté ;
- l’arrêté contesté méconnaît la loi du 9 décembre 1905 ;
- la condition d’urgence est remplie dès lors que, d’une part, l’arrêté contesté préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation des requérants ainsi qu’aux intérêts qu’ils entendent défendre, d’autre part, l’appel a été formé dans les plus brefs délais et, enfin, l’arrêté contesté a vocation à produire ses effets jusqu’au 15 septembre 2016 ;
- l’arrêté contesté porte une atteinte grave et manifestement illégale au principe d’égalité des citoyens devant la loi, à la liberté d’expression, à la liberté de conscience et à la liberté d’aller et venir ;
- il ne repose sur aucun fondement juridique pertinent.
Par un mémoire en défense, enregistré 25 août 2016, le maire de la commune de Villeneuve-Loubet conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d’urgence n’est pas remplie et que les moyens soulevés par l’association requérante ne sont pas fondés.
Des observations, enregistrées le 25 août 2016, ont été présentées par le ministre de l'intérieur.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la Constitution, et notamment son Préambule et l’article 1er ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l’Etat ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d’une part, la Ligue des droits de l’homme et autres et l’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France et, d’autre part, la commune de Villeneuve‑Loubet ainsi que le ministre de l’intérieur ;
Vu le procès-verbal de l’audience publique du 25 août 2016 à 15 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Spinosi, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, avocat de la Ligue des droits de l’homme et autres ;
- les représentants de l’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France ;
- Me Pinatel, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, avocat de la commune de Villeneuve-Loubet ;
- le représentant de la commune de Villeneuve-Loubet ;
- la représentante du ministre de l’intérieur ;
et à l’issue de laquelle l’instruction a été close ;
Considérant ce qui suit :
1. En vertu de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, lorsqu’est constituée une situation d’urgence particulière, justifiant qu’il se prononce dans de brefs délais, le juge des référés peut ordonner toute mesure nécessaire à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une autorité administrative aurait porté une atteinte grave et manifestement illégale.
2. Des arrêtés du maire de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes) du 20 juin 2014 puis du 18 juillet 2016 ont réglementé l’usage des plages concédées à la commune par l’Etat. Ces arrêtés ont été abrogés et remplacés par un nouvel arrêté du 5 août 2016 qui comporte un nouvel article 4.3 aux termes duquel : « Sur l’ensemble des secteurs de plage de la commune, l’accès à la baignade est interdit, du 15 juin au 15 septembre inclus, à toute personne ne disposant pas d’une tenue correcte, respectueuse des bonnes mœurs et du principe de laïcité, et respectant les règles d’hygiène et de sécurité des baignades adaptées au domaine public maritime. Le port de vêtements, pendant la baignade, ayant une connotation contraire aux principes mentionnés ci-avant est strictement interdit sur les plages de la commune ». Ainsi que l’ont confirmé les débats qui ont eu lieu au cours de l’audience publique, ces dispositions ont entendu interdire le port de tenues qui manifestent de manière ostensible une appartenance religieuse lors de la baignade et, en conséquence, sur les plages qui donnent accès à celle-ci.
3. Deux requêtes ont été présentées devant le juge des référés du tribunal administratif de Nice pour demander, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, la suspension de l’exécution de ces dispositions de l’article 4.3 de l’arrêté du maire de Villeneuve-Loubet. La première de ces requêtes a été introduite par la Ligue des droits de l’homme, M. Hervé Lavisse et M. Henri Rossi, la seconde par l’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France. Par une ordonnance du 22 août 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Nice, statuant en formation collégiale de trois juges des référés, a rejeté ces deux requêtes. La Ligue des droits de l’homme, M. Hervé Lavisse et M. Henri Rossi, d’une part, l’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France, d’autre part, font appel de cette ordonnance par deux requêtes qui présentent à juger les mêmes questions et qu’il y a lieu de joindre.
4. En vertu de l’article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales, le maire est chargé, sous le contrôle administratif du préfet, de la police municipale qui, selon l’article L. 2212-2 de ce code, « a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques ». L’article L. 2213-23 dispose en outre que : « Le maire exerce la police des baignades et des activités nautiques pratiquées à partir du rivage avec des engins de plage et des engins non immatriculés…Le maire réglemente l’utilisation des aménagements réalisés pour la pratique de ces activités. Il pourvoit d’urgence à toutes les mesures d’assistance et de secours. Le maire délimite une ou plusieurs zones surveillées dans les parties du littoral présentant une garantie suffisante pour la sécurité des baignades et des activités mentionnées ci-dessus. Il détermine des périodes de surveillance… ».
5. Si le maire est chargé par les dispositions citées au point 4 du maintien de l’ordre dans la commune, il doit concilier l’accomplissement de sa mission avec le respect des libertés garanties par les lois. Il en résulte que les mesures de police que le maire d’une commune du littoral édicte en vue de réglementer l’accès à la plage et la pratique de la baignade doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées au regard des seules nécessités de l’ordre public, telles qu’elles découlent des circonstances de temps et de lieu, et compte tenu des exigences qu’impliquent le bon accès au rivage, la sécurité de la baignade ainsi que l’hygiène et la décence sur la plage. Il n’appartient pas au maire de se fonder sur d’autres considérations et les restrictions qu’il apporte aux libertés doivent être justifiées par des risques avérés d’atteinte à l’ordre public.
6. Il ne résulte pas de l’instruction que des risques de trouble à l’ordre public aient résulté, sur les plages de la commune de Villeneuve-Loubet, de la tenue adoptée en vue de la baignade par certaines personnes. S’il a été fait état au cours de l’audience publique du port sur les plages de la commune de tenues de la nature de celles que l’article 4.3 de l’arrêté litigieux entend prohiber, aucun élément produit devant le juge des référés ne permet de retenir que de tels risques en auraient résulté. En l’absence de tels risques, l’émotion et les inquiétudes résultant des attentats terroristes, et notamment de celui commis à Nice le 14 juillet dernier, ne sauraient suffire à justifier légalement la mesure d’interdiction contestée. Dans ces conditions, le maire ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs de police, édicter des dispositions qui interdisent l’accès à la plage et la baignade alors qu’elles ne reposent ni sur des risques avérés de troubles à l’ordre public ni, par ailleurs, sur des motifs d’hygiène ou de décence. L’arrêté litigieux a ainsi porté une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que sont la liberté d’aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle. Les conséquences de l’application de telles dispositions sont en l’espèce constitutives d’une situation d’urgence qui justifie que le juge des référés fasse usage des pouvoirs qu’il tient de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. Il y a donc lieu d’annuler l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice du 22 août 2016 et d’ordonner la suspension de l’exécution de l’article 4.3 de l’arrêté du maire de Villeneuve-Loubet en date du 5 août 2016.
7. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de la Ligue des droits de l’homme, de M. Lavisse, de M. Rossi et de l’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France. Il n’y pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Villeneuve-Loubet, en application de ces dispositions, les sommes que demandent, d’une part, la Ligue des droits de l’homme, M. Lavisse et M. Rossi, d’autre part l’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France.
O R D O N N E :
Article 1er : L’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice en date du 22 août 2016 est annulée.
Article 2 : L’exécution de l’article 4.3 de l’arrêté du maire de Villeneuve-Loubet en date du 5 août 2016 est suspendue.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Villeneuve-Loubet et celles de la Ligue des droits de l’homme, de M. Lavisse, de M. Rossi, et de l’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4. La présente ordonnance sera notifiée à la Ligue des droits de l’homme, à M. Lavisse, à M. Rossi, à l’Association de défense des droits de l’homme Collectif contre l’islamophobie en France, à la commune de Villeneuve-Loubet et au ministre de l’intérieur.


Accueil / Actualités / Communiqués / Mesure d’interdiction des tenues regardées comme manifestant...
·          
·          
·          
·          
·          
·          
·          
26 août 2016 | Décision contentieuse

Mesure d’interdiction des tenues regardées comme manifestant de manière ostensible une appartenance religieuse lors de la baignade et sur les plages.

Le juge des référés du Conseil d’Etat suspend une mesure d’interdiction des tenues regardées comme manifestant de manière ostensible une appartenance religieuse lors de la baignade et sur les plages.

L’essentiel

·         Le maire de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes) avait interdit le port de tenues regardées comme manifestant de manière ostensible une appartenance religieuse lors de la baignade et sur les plages. Des associations et des particuliers demandaient la suspension de cette interdiction.
·         Le juge des référés du Conseil d’État rappelle, conformément à une jurisprudence constante depuis plus d’un siècle, qu’il appartient au  maire de concilier l’accomplissement de sa mission de maintien de l’ordre dans la commune avec le respect des libertés garanties par les lois. Les mesures de police que le maire d’une commune du littoral édicte en vue de réglementer l’accès à la plage et la pratique de la baignade doivent donc être adaptées, nécessaires et proportionnées au regard des seules nécessités de l’ordre public. Il n’appartient pas au maire de se fonder sur d’autres considérations.
·         A Villeneuve-Loubet, aucun élément ne permet de retenir que des risques de trouble à l’ordre public aient résulté de la tenue adoptée en vue de la baignade par certaines personnes. En l’absence de tels risques, le maire ne pouvait prendre une mesure interdisant l’accès à la plage et la baignade.
·         Le juges des référés du Conseil d’État suspend donc cette mesure d’interdiction.

Les faits et la procédure

Le 5 août 2016, le maire de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes) a pris un nouvel arrêté en vue de règlementer l’usage des plages concédées à la commune par l’État. Cet arrêté comporte un nouvel article 4.3 dont l’objet est d’interdire le port de tenues qui sont regardées comme manifestant de manière ostensible une appartenance religieuse lors de la baignade et, en conséquence, sur les plages qui donnent accès à celle-ci.
La Ligue des droits de l’homme (LDH) et deux particuliers, d’une part, l’Association de défense des droits de l’homme-Collectif contre l’islamophobie en France, d’autre part, avaient formé un référé-liberté pour demander au juge des référés du tribunal administratif de Nice de suspendre cet article 4.3. Cette procédure du référé liberté, prévue par l’article L. 521-2 du code de justice administrative, permet au juge administratif d’ordonner, dans un délai de quarante-huit heures, toutes les mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une autorité administrative aurait porté une atteinte grave et manifestement illégale. Pour obtenir satisfaction, le requérant doit justifier d’une situation d’urgence particulière, justifiant que le juge se prononce dans de brefs délais.
Par une ordonnance du 22 août 2016, le tribunal administratif de Nice, statuant en formation collégiale de trois juges des référés, a rejeté les deux requêtes. Les requérants ont alors fait appel devant le juge des référés du Conseil d’État.
Après avoir tenu une audience publique le 25 août 2016, le juge des référés du Conseil d’État, statuant également en formation collégiale de trois juges,  a rendu aujourd’hui son  ordonnance.

La décision du Conseil d’État

Dans l’ordonnance qu’il a rendue aujourd’hui, le juge des référés du Conseil d’État commence par préciser le cadre juridique. Il rappelle que le maire est chargé de la police municipale. Mais il souligne, conformément à une jurisprudence constante depuis plus d’un siècle, que le maire doit concilier l’accomplissement de sa mission de maintien de l’ordre dans la commune avec le respect des libertés garanties par les lois. Les mesures de police que le maire d’une commune du littoral édicte en vue de réglementer l’accès à la plage et la pratique de la baignade doivent donc être adaptées, nécessaires et proportionnées au regard des seules nécessités de l’ordre public, telles qu’elles découlent des circonstances de temps et de lieu, et compte tenu des exigences qu’impliquent le bon accès au rivage, la sécurité de la baignade ainsi que l’hygiène et la décence sur la plage. Il n’appartient pas au maire de se fonder sur d’autres considérations et les restrictions qu’il apporte aux libertés doivent être justifiées par des risques avérés d’atteinte à l’ordre public.
Examinant ensuite l’arrêté contesté, le juge des référés du Conseil d’État relève  qu’aucun élément produit devant lui ne permet de retenir que des risques de trouble à l’ordre public aient résulté, sur les plages de la commune de Villeneuve-Loubet, de la tenue adoptée en vue de la baignade par certaines personnes. En l’absence de tels risques, l’émotion et les inquiétudes résultant des attentats terroristes, notamment de celui commis à Nice le 14 juillet dernier, ne sauraient suffire à justifier légalement la mesure d’interdiction contestée. Le juge des référés en déduit que, dans ces conditions, le maire ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs de police, édicter des dispositions qui interdisent l’accès à la plage et la baignade alors qu’elles ne reposent ni sur des risques avérés de troubles à l’ordre public ni, par ailleurs, sur des motifs d’hygiène ou de décence.
Le juge des référés du Conseil d’État conclut donc que l’article 4.3 de l’arrêté contesté a porté une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que sont la liberté d’aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle. La situation d’urgence étant par ailleurs caractérisée, il annule l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice et ordonne la suspension de cet article.


Dixit « Le Monde » : une circulaire sur la PMA peut instaurer une peine de prison



Ceci pourrait être l’histoire de la petite circulaire invisible qui a tranquillement reversé la constitution française … selon la « grande » presse du moins.

Ou ceci pourrait être l’histoire d’une inquiétante apathie : en France en 2016, on peut annoncer tous azimuts qu’une ministre a instauré une nouvelle peine d’emprisonnement, sans que personne ne s’étonne.

L’annonce du jour : « La ministre des familles, Laurence Rossignol, a confirmé lundi 4 juillet la prochaine abrogation d’une circulaire punissant les gynécologues orientant leurs patientes vers l’étranger pour y subir une PMA (procréation médicalement assistée ». Cette annonce intervient après la promesse faite jeudi par le Président de la République aux associations LGBT »(  « Le Monde avec AFP », 4 juillet 2016).

Il n’y aucune trace d’une telle promesse dans le communiqué publié le 30 juin sur Elysee.fr après la rencontre entre François Hollande et trois associations « LGBT ». 

L’Express du 4 juillet reprend dans les mêmes termes : « Laurence Rossignol a confirmé la suppression d’une mesure visant à punir les gynécologues qui orientent leurs patientes vers l’étranger pour y effectuer une PMA ». De même, 20 minutes, le magazine LGBT « Yagg » …

Je cherche ladite circulaire. Rien au Journal Officiel, rien sur le site du Ministère. Dans les archives de la presse de 2013, j’apprends de diverses journaux que cette fameuse circulaire est « un texte du ministère de la Santé, que nous nous sommes procuré » (« Le Parisien » 5 février 2013).
Damned, mieux vaut avoir de bons contacts dans l’administration pour « se procurer » les textes du droit en vigueur !

L’article du Parisien précisait : « les services de Marisol Touraine menacent donc « de cinq ans de prison et 75000 € d’amende » tout gynécologue français qui relaieraient [les] offres commerciales [des cliniques étrangères] auprès de ses patientes ».

Damned, cinq ans de prison pour avoir relayé à une patiente une information disponible à toutes depuis l’existence du Minitel, Touraine frappait fort pour faire cesser les Manifs pour tous …
Il était temps, comme l’expliquait lundi Laurence Rossignol, que l’on cesse de « compliquer la vie des couples lesbiens ». Toutes celles qui n’ont pas accès à internet lui en seront grandement reconnaissantes. D’autant que la tâche sera ardue : il va bien falloir retrouver la circulaire invisible pour pouvoir l’abroger, n’est-il-pas ?

Je relis la Constitution sur le site du JO, au cas où une nouvelle version viendrait de sortir subrepticement. « Des rapports entre le parlement et le gouvernement », Article 34 : « La loi fixe les règles concernant … les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques ... la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables ». 

Certes, il faut se reporter au code pénal pour savoir qu’un délit est une infraction punie de prison.  Certes, la Constitution de 1958 a opéré une forme de révolution dans les rapports entre les pouvoirs en cantonnant le domaine de la loi à une liste limitative, objet de l’article 34.  Mais pas à ce point …
N’y a –t-il personne au « Monde » pour s’interroger en voyant écrit qu’une circulaire (secrète ?) « dont le Parisien détient un fac similé » pourrait instaurer une peine privative de liberté ? Manifestement non …

Le texte de 2013 rappelait probablement l’article 511-9 du code pénal réprimant l’achat et l’entremise dans l’achat de gamètes, car des gynécos s’y livreraient. Un article indispensable me semble-t-il …





Enfants maltraités : quand l’Eglise écoute et enquête …

Préambule :  le présent article est une autre forme d'hommage à Maya Surduts, dont je publie dans l'article suivant la lettre que j'avais rédigée en 1999 et qu'elle avait co-signée, en réponse à un dossier du Nouvel Observateur. 
Le rapport sur l'institut Marini contient l'observation suivante, page 74 : 

" La perception de l'abus sexuel sur enfants par les experts et le grand public : 
Dans les années 1940-1950, les premières recherches en psychologie, psychiatrie et sexologie minimisent l'impact de l'abus sexuel sur l'enfant. Inspirés par la tradition freudienne ... (...) L'impact du mouvement féministe s'avère bien plus décisif (...) c'est alors qu'émerge un problème inattendu : les violences sexuelles dont les femmes déclarent avoir été victimes durant leur enfance, la plupart du temps à l'intérieur de leur famille "




Enfants maltraités : quand l’Eglise écoute et enquête …


Fribourg, Suisse. De 1929 à 1950, l’Eglise a la responsabilité d’un pensionnat pour garçons, l’institut Marini.
2014, un ancien pensionnaire rencontre l’évêque de Fribourg, et lui raconte les violences qu’il a vécues à l’époque dans ce pensionnat …
Pour toute personne qui entend le témoignage d’une victime de crime sexuel, il est difficile de réaliser que de telles violences sont vraiment arrivées, dans la réalité … Que s’est-il effectivement passé ? Comment il est possible que ces actes aient eu lieu, durant des années ?
Mgr Charles Morerod décide alors de confier une enquête à trois chercheurs, indépendants de l’Eglise. Une année de recherches aboutit à un rapport publié sur le site de l’évêché en janvier dernier http://www.diocese-lgf.ch/accueil/abus-sexuels.html

Mon point de vue de féministe française sur l’Eglise et les crimes sexuels
De Fribourg j’avais entendu dire en France qu’elle était « Fribourg la catholique, Fribourg la noire », presqu’un second Vatican miniature.  Autant dire qu’en apprenant la nouvelle d’un scandale d’ « abus sexuels » sur des enfants dans un institut dépendant de cet évêché, j’ai été interpellée.
L’institut Marini recueillait des enfants en difficulté. Le rapport publié hier ( http://www.diocese-lgf.ch/medias/actualites/articles/article/enfants-places-a-linstitut-marini-de-montet-fr.html - http://www.diocese-lgf.ch/fileadmin/documents/Documents/Marini/Marini_resume_rapport_recherche.pdf  )  révèle que 21 enfants au moins y ont été agressés sexuellement de 1930 à 1955 par des religieux et des laïques.
Pour les féministes, l’existence d’une chape de silence autour des crimes sexuels contre les enfants est un phénomène connu, et qu’elles ont largement contribué à soulever, au prix de combats contre toutes les autorités en place, notamment le « pouvoir psy » du dogme psychanalytique. En France, c’est le livre d’Eva Thomas : « Le viol du silence », puis le roman de Christiane Rochefort « La porte du fond » qui firent connaitre cette « conspiration des oreilles bouchées » dans les années 80.
Des groupes de paroles se constituèrent. Les victimes, femmes et hommes, dirent que leurs « incestueurs » étaient majoritairement des hommes « libérés », des pères responsables se chargeant de « l’éducation sexuelle » de leurs filles, friands de pornographie. Elles dirent que les adultes ne les croyaient pas, que les prêtres les pensaient perverses, et que les psychanalystes freudiens les accusaient de « fantasmer ». Elles dirent que quasiment toutes les autorités, les familles, les écoles, les médecins, quelques soient leur classe ou leur confession, avaient la même réaction : nier, cacher le crime. Ou pire : psychiatriser les victimes et persécuter les mères ou médecins qui tentaient de protéger les enfants.
Ainsi, la longue dissimulation de ces crimes n’a rien de surprenant et rien qui serait propre aux milieux catholiques. Si je m’inquiète de l’évènement que constitue ce rapport, c’est en raison de la signification qui va lui être donnée. Je crains un nouveau contresens, au détriment des enfants.
 La question des répercutions de la théologie catholique sur les violences sexuelles est un sujet très vaste et complexe : je souligne que je ne parle dans le présent article que d’un seul de ses aspects et absolument pas du « catéchisme » dans son ensemble.
 Le commentaire le plus fréquent aujourd’hui des crimes sexuels commis par des religieux contre des enfants consiste à dire : l’enseignement de l’Eglise prône une limitation abusive de la sexualité, elle produit la frustration qui est la cause des crimes sexuels.   
Ce raisonnement est faux. L’inverse est vrai. L’enseignement de l’Eglise sur les limites de la sexualité est une protection des plus faibles contre les crimes sexuels. Elle enseigne la valeur première des personnes humaine. Les crimes sexuels ne sont pas produits par la limitation de la sexualité, mais par le culte de la sexualité, par l’idée du « droit à la sexualité ». Un culte qui légitime la réduction de personnes à l’état d’objet : il y aurait des « femmes faites pour cela ».  
Pourquoi un tel battage médiatique aujourd’hui au sujet de la pédophilie dans l’Eglise, alors que la quasi-totalité de la pédophilie est incestueuse ?  Parce que malgré ses lacunes et son restant de vanité masculine sexiste, l’enseignement de l’Eglise sur la sexualité est, et a essentiellement toujours été, un barrage «  magistral » aux crimes sexuels.
« Arrache toi l’œil s’il scandalise un petit … ! ». Qui dans le monde antique avant l’Evèque d’Epone s’écriait, parlant des prostituées, pour convaincre les hommes de ne pas les « consommer » : « Oubliez-vous qu’elles ont une âme ?! ». La « théologie du corps » de Jean-Paul II est une arme de destruction massive de toute la rhétorique perverse utilisée pour justifier les violences sexuelles et émotionnelles.
L’idolâtrie de la sexualité permet de trouver toutes les excuses au violeur. Pire, elle permet à Freud de décrire l’adolescente Dora comme étant elle, perverse et malade, parce qu’elle refuse les avances d’un adulte. Les féministes américaines Andréa Dworkin et Robin Morgan expliquaient au sujet de la « libération sexuelle » de 68 : «L’idée à la mode était que la baise était une bonne chose, tellement bonne que plus il y en avait, mieux c’était, que les gens devaient baiser qui ils voulaient. La baise s’était la liberté. » « A Woodstock ou à Altamont, une femme pouvait être qualifiée de “coincée” ou “vieux-jeu” si elle refusait de se laisser violer ».
La primauté de la personne, contre l’idolâtrie du plaisir et du pouvoir sexuel, est un enseignement qui fâche, que dis-je, qui déclenche la fureur de tous ceux qui veulent exercer ce pouvoir là sur autrui, qui veulent l’argent du « travail du sexe ». Un tiers de la bande passante mondiale d’internet est utilisée pour la pornographie. Un des hommes les plus riches de France a acquis sa fortune grâce au téléphone rose.
L’Eglise avec son enseignement de chasteté est l’ennemi à abattre. Ses prêtres, des hommes masculins, parce qu’ils sont la preuve vivante que l’amour, la force, la virilité, ne passent pas nécessairement par la case sexe, doivent être tués, médiatiquement - dans un premier temps. On ne doit plus pouvoir penser « prêtre » sans penser « prêtre pédophile ».
Le rapport de l’évêché de Fribourg doit être lu intégralement : les chercheurs qui l’ont rédigé présentent à la fois les documents, le cadre historique et idéologique, et les questionnements soulevés par ces faits, auxquels tous, catholiques ou non, devraient réfléchir.  Il ne faut surtout pas qu’il en résulte un contresens qui abattrait une pensée protégeant les enfants ...
Elisseievna
Militante féministe


Hommage à Maya Surduts - suite ....

Paris le 26 mai  1999


Le Nouvel Observateur
M. Laurent JOFFRIN
Rédacteur en chef

                                              
LETTRE AU SUJET DU DOSSIER DU NOUVEL OBS
SUR LES PERES ET LEURS FILLES

Monsieur,

Compte tenu de la gravité de la divulgation par votre journal de thèses favorables aux pères incestueux, nous vous demandons de bien vouloir publier le texte suivant, afin de donner aux lecteurs  une vision plus exacte  de la réalité de ces crimes.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur, nos salutations distinguées.


LETTRE

Nous vous faisons part de notre indignation devant la teneur de votre dossier sur les pères et leurs filles.
Tout d'abord il est frappant de constater que les grands  titres utilisés dans ce dossier sont typiques de la rhétorique des pervers incestueux. Des expressions telles que "le couple le plus mystérieux""amoureux de sa fille, amoureuse de son père" qui relèvent du vocabulaire érotique sont transposés à la relation filiale. Il ne peut d'agir ici d'allégories innocentes, car elles représentent la confusion entre les générations, qui est une des caractéristiques de l'inceste. "Je l'ai initiée parce que je l'aime" prétendent les pères incestueurs. 
Mais le plus grave est l'affirmation explicite, se référant à la théorie classique de la psychanalyse, selon laquelle : " Tout remonte à la petite enfance, à ce complexe d'Oedipe" "La séduction de la fille est un substitut à la séduction phallique du garçon envers sa mère. Certains pères cèdent à cette séduction s'ils sont mal structurés psychiquement. D'où le nombre important d'incestes ". Imputer la cause des incestes à la séduction des pères par leur filles c'est blâmer la victime, rentrer dans la logique perverse de l'agresseur.
Pendant des décennies les cas d'incestes sont apparus  peu fréquents : pourquoi ? Parce que au nom d'une théorie du complexe d'Œdipe érigée en dogme, la psychanalyse officielle avait imposé l'idee que les filles n'etaient pas agressées en réalité, qu'elles "fantasmaient" ! Personne ne croyait les victimes … Depuis les travaux de Mary Balmary, de Jeffrey Moussaiev Masson, d'Alice Miller et d'autres psys, la théorie psychanalytique a été remise en cause au sujet de l'inceste : votre article n'en fait aucune mention.
Non les incestes ne sont pas dus à la perversion des filles, mais bien à celle des pères. Non l'inceste n'est pas une relation d'amour,  mais de destruction de l'enfant. Les pères l'imposent par la violence, la terreur, la menace, sur les enfants et sur la mère, ou par une emprise douceureuse et d'autant plus déstructurante pour l'enfant. Ils l'imposent aussi, et de plus en plus actuellement  en accusant la mère qui tente de protéger l'enfant, d'allégations mensongères, de dénonciation calomnieuses, de non-présentation de l'enfant...
Forcer un enfant à voir son père, serait ce une preuve d'amour de la part de ce dernier ?
Une campagne est menée actuellement pour discréditer ces mères. Certes, la manipulation d'un enfant dans un divorce, l'accusation fausse contre un père peuvent être dramatiques, d'abord pour l'enfant. Mais un abus sexuel subi par un enfant laisse de nombreuses traces objectives (son comportement, celui de son entourage, ses réactions, son état de santé physique et mentale…) que des psychologues et des enquêteurs de police, dès lors qu'ils font une étude approfondie, ne peuvent confondre avec le comportement d'un enfant qui aurait été manipulé. Les affaires de pseudo- souvenirs d'inceste obtenus sous hypnose aux USA, qui sont des aberrations, ne doivent pas être récupérées pour disqualifier les expertises des pédopsychiatres en France.
Nous lançons un cri d'alarme. Parmi les pervers il y a nombre d'hommes puissants, influents, manipulateurs, parfaitement capables d'orchestrer de telles campagnes. La presse doit être vigilante, ne pas se prêter à leur jeu : le sort de milliers d'enfants en dépend.

Signatures :
- Francine Comte, auteure de "Jocaste délivrée - maternité et représentation des rôles sexuels" (1991)
- Françoise Gaspard, sociologue, E.H.E.S.S.
- Maya Surduts, Elisseievna, militantes féministes





Hommage à Maya Surduts




Hommage à Maya Surduts


Une page se tourne, dans l’histoire du mouvement féministe, dans mon histoire.

Maya Surduts, âme d’une grande partie du mouvement féministe depuis les années 70, est morte ce matin, 13 avril.

Maya et moi étions proches pendant des années. 
Nous rentrions des assemblées ensemble. Nous partagions quelques mêmes passions : la messe de Pâques de la Cathédrale Orthodoxe de la rue Daru, les papiers mâchés de Palekh. 
Elle, famille juive d’Estonie, moi, juifs de .. un peu toutes les Russies. 
Son petit appartement dans un vieil immeuble a une atmosphère « typiquement russe », tons chaud, couleurs, coussins, peintures partout, miniatures, livres. Un curieux tableau grand format d’une papaye ouverte en deux … qui m’a toujours fait rire. 
Elle m’emmène voir l’expo d’un ami peintre russe. Je l’emmène en voiture … ranger la cave de son appartement trop petit, entrer dans une maison de repos de banlieue pour quelques semaines, nous rendons visite à Francine Comte (féministe, mère de quatre enfants et auteure d’un livre sur la maternité « Jocaste délivrée »)  atteinte d’un cancer.
Maya atterrit quelques semaines chez moi quand elle se casse la cheville et ne peut plus rester dans son appartement sans ascenseur. Elle fulmine contre mon fax : « tu ne maîtrise absolument pas cet appareil ! » … pour sur ! 
Je lisais Yechayahou Leibowicz (letton comme Maya puis israelien, « docteur » en série : chimie, médecine, philo, auteur de nombreux livres de morale) une autre de nos passions communes. Je lui prête le livre. Quelques mois après je passe chez elle, et je lui demande si je peux reprendre le livre : elle me répond :  « Il est aussi bien ici ! ». Le communisme en action… si ça lui fait plaisir, il l’accompagnera ...

Maya était connue pour son caractère calme … enfin pas tout à fait calme. Connue pour avoir fait politiquement les bons choix, enfin très souvent, pour n’avoir jamais été fourbe ou méchante avec quiconque. Mais Maya Surduts pensait que la politique est une affaire de rapport de force.

En 2004, je la mets en garde contre la présence de Tariq Ramadan au Forum social européen, elle ne sait pas qui il est, elle pige vite, elle ira avec Suzy Rojtman protester à l’entrée du FSE. Je lui fait part de mes lectures et réflexions sur l’islam, au fur et  à mesure de mon étude de ce sujet. Elle approuve.
C’est grâce à elle et Sylvie Jan que, de nombreux pays musulmans sont venues témoigner des femmes féministes, aux Assises pour les droits des femmes en particulier. Mon amie Shoukria Haïdar, notamment, tadjik, communiste, féministe … et alliée avec Massoud.

Puis, à un moment … elle me dit : « Tu sais qu’il y a d’autres problèmes que la laïcité ! ». Je suis peut-être un peu obsédée en effet, pensais-je, mais d’un autre côté, si l’islam l’emporte ici, comme il l’a fait en Iran, en Algérie, nos problèmes féministes on pourra se les carrer quand même !

Quelques temps après, un nouveau drame, encore une jeune fille abominablement meurtrie au nom de l’islam : moi qui crains je l’avoue de m’exprimer en public sur ce sujet, je craque, j’appelle Maya, je lui dis qu’il faut que j’explique aux filles les causes de ces actes, qu’il ne suffit pas, comme le mouvement des femmes le fait depuis des décennies, de s’en prendre aux effets, mais qu’il faut maintenant parler du droit islamique. Elle me répond, presque en murmurant : « Tu ne peux pas venir, si tu parles de ce sujet, le Collectif explose ». Elle dit vrai, sans doute, le Collectif exploserait …
Je suis convaincue qu’elle fait le pire des choix, mais je la comprends. «  On fait avec ce qui reste » disait-elle. Rapport de force oblige. Pensée du rapport de force qui emprisonne.

Quelques temps plus tard encore je suis attaquée par les filles de Prochoix, comme je l’ai écrit dans des articles précédents. Je lui demande son aide. Elle me répond, murmurant encore : « Ces filles sont capables de tout, ce sont des tueuses. Mais je dois te le dire franchement : je ne peux pas t’aider, le Collectif ne le comprendrait pas … ». Un jour Maya m’avait dit « Je suis une gentille moi ! ». C’était drôle étant donné ses engueulades fameuses, mais c’était vrai : gentille, franche, faisant passer la cause défendue avant beaucoup de choses, et parfois à regret …

Notre seul désaccord fondamental portait sur les corneilles : elle trouvait ces oiseaux beaux, elle admirait le spectacle d’une corneille dans le parc devant la chambre de sa maison de repos … je les trouve horribles, j’aime les moineaux.


Maya avait peur de vieillir, « je suis très fatiguée » m’avait-elle juste dit il y a deux mois, lors d’un colloque sur la GPA. J’aurais préféré qu’elle vieillisse quand même un peu plus …

elisseievna


https://www.ensemble-fdg.org/content/ciao-maya

Ciao Maya



La dernière fois que j’ai vue Maya, ce fut lors de l’enterrement de Muriel Naessens, membre du Planning familial du 93, féministe chaleureuse et animatrice du théâtre de l’opprimé. Il y avait beaucoup de monde. Maya était très affaiblie et l’on sentait qu’elle avait fait un immense effort pour venir jusqu’au Père-Lachaise partager ce moment d’émotion. Cette cérémonie fut aussi l’occasion de découvrir les multiples facettes de la vie de Murielle. Comme on découvre ou redécouvre aujourd’hui les mille et une vies de Maya à travers les nombreux hommages qui lui sont rendus ou dans l’entretien qu’elle a accordé à Margaret Maruani et Rachel Silvera en 20131. Née en 1937 à Riga en Lettonie, Maya était la fille d’un couple d’intellectuels, juifs et communistes (du moins son père) venus se refugier dans le Paris du Front populaire. La vie de la jeune Maya fut très mouvementée, marquée par la guerre et la crainte des nazis, puis les voyages : celui, très jeune, en Afrique du Sud, pays de l’Apartheid, pour rencontrer son grand père maternel ; celui à Genève pour échapper aux contrôles de la police française après avoir aidé, avec sa famille, la résistance algérienne ; aux USA où elle s’est engagée avec le mouvement étudiant dans la lutte pour les droits civiques des « noirs ». Ce fut ensuite un long séjour de huit ans dans la Cuba révolutionnaire dont elle fut expulsée en 1971 pour ses critiques contre l’évolution du Régime. Elle rentre alors à Paris, le Paris de l’après mai 1968 et de l’émergence spectaculaire du nouveau mouvement féministe.
A partir de cette date, elle n’a pas cessé de mener de front un combat politique au sein ou à côté de la gauche radicale2et un combat féministe qui devint le centre de son engagement. Elle cofonda le MLAC3 en 1973, mouvement unitaire qui osa braver la loi en pratiquant des avortements illégaux et joua un rôle décisif dans la création d’un rapport de force en faveur de la liberté de l’avortement et de la contraception. Face à la mobilisation sans précédent de dizaines de milliers de manifestant.es dans toute la France, le nouveau gouvernement de Giscard d’Estaing fut contraint de reconnaître aux femmes le droit à « l’interruption volontaire de grossesse » à la fin de 1974, mais avec des restrictions et sans remboursement. Après le vote de cette loi, une partie des féministes prit du recul. Maya, quant à elle, continua à mobiliser les énergies s pour faire appliquer cette loi, pour obtenir le remboursement de cet acte en 1982, la levée des restrictions et favoriser la diffusion de la contraception, en 2001. Entretemps, Elle cofonda de manière unitaire la CADAC en 1990 pour faire échec aux commandos anti-avortement à la solde de l’extrême droite et des catholiques intégristes qui sévissaient régulièrement sur certains marchés, dans les hôpitaux ou les cliniques pour intimider les femmes qui souhaitaient avorter ainsi que les personnels médicaux ou paramédicaux. C’est grâce à la CADAC que fut obtenue la création en 1993 du délit d’entrave à la loi sur l’IVG. Mais le droit à l’avortement ne fut pas le seul axe de luttes pour Maya. Elle créa avec Suzy Rojtman, Simone IFF et Nathalie Bourdon, le Collectif féministe contre le viol en 1985, en plein creux de la vague féministe.
Le mouvement féministe en France ne se résume pas à l’action de certaines personnalités, loin de là. Mais Maya en fut effectivement un des piliers grâce à sa détermination, sa fibre internationaliste et sa boussole « luttes de classes ». Pour elle, comme pour nous, la lutte contre l’oppression des femmes était inséparable de la lutte contre l’exploitation capitaliste. C’est pourquoi elle fut partie prenante de toutes les initiatives contre le développement du temps partiel et de la précarité imposées aux salariées aux côtés d’autres féministes investies dans le travail syndical ou en lien avec des chercheuses du GEDISST4. Elle apporta son soutien, avec d’autres, à la lutte de femmes salariées comme celle des infirmières et de leur coordination entre 1989 et 1991. Un peu plus tard elle rejoignit le comité de soutien aux femmes de l’ex-Yougoslavie, victimes de violences spécifiques et du viol comme arme de guerre.
L’activisme de Maya pouvait fatiguer certaines mais bien souvent elle avait un sens de l’initiative remarquable. Après l’élection de J. Chirac aux présidentielles de 1995 qui avait offert certains ministères aux membres de l’Opus Dei et les menaces qui pesaient sur les droits des femmes, Maya fut de celles qui réussirent à convaincre la majorité des associations féministes mais aussi des associations antifascistes comme Ras-Le-Front, différentes composantes du mouvement syndical dont la CGT, l’extrême gauche et le PCF, à faire une grande manifestation, pour les droits femmes, pour le droit à l’emploi et contre l’ordre moral en particulier. Ce fut le 24 novembre 1995. Un immense succès malgré (ou à cause) de la grève des cheminots qui commença la veille. 40 000 personnes se retrouvèrent à Paris pour dénoncer la politique gouvernementale et la montée de l’extrême droite ; anciennes et nouvelles féministes, femmes et hommes se retrouvèrent au coude à coude, CGT et PCF manifestant pour la première fois aux côtés des associations féministes5. Le lendemain commençait le grand mouvement social de 1995. Dans la foulée se créa le Collectif national pour les droits des femmes qui organisa en 1997 les Assises pour les droits des femmes auxquelles participèrent 2000 personnes (dont une majorité de femmes), venues de tous les horizons.
C’est au cours de toutes ces décennies que Maya sut nouer de nombreux liens avec les animatrices et animateurs de multiples luttes, coordinations et collectifs divers mais aussi avec certains élu.es de la gauche, des Verts, des syndicalistes des deux sexes ou responsables de la Gauche radicale et plusieurs chercheuses. Tous ces contacts se retrouvaient dans un carnet d’adresses boursoufflé qu’elle trimballait et oubliait partout. Il ne s’agissait pas tant de satisfaire son égo personnel que de travailler au corps les différents secteurs de la société en mouvement et de les alerter sur l’urgence de se mobiliser en faveur des droits des femmes et du combat féministe. Elle nous sollicitait toutes et tous pour tenter de mieux comprendre également les bouleversements survenus dans les rapports de force politiques et sociaux en France et sur le plan international « après la chute du mur de Berlin » en 1989. Comme nous, elle chercha à lutter contre les guerres relancées par Bush père et fils, en Irak, en Afghanistan etc. les politiques d’austérité et les crises financières imposées non seulement aux peuples du Sud mais dans tous les pays occidentaux etc. Comme nous elle fut catastrophée par la remontée de l’extrême droite, du racisme à l’égard des personnes immigrées et de leurs enfants né.es en France, des intégrismes religieux tant aux USA, qu’en Israël, en Algérie etc. Comme nous elle se solidarisa avec les féministes algériennes molestées et menacées d’assassinat dans leur pays, et dont certaines ont trouvé asile en France. C’est dans ce contexte que la question du voile à l’école a émergé en France en 1989 et a rebondi en 2003-2004 (et régulièrement depuis) quand Jacques Chirac a décidé d’interdire le port de signes religieux « ostentatoires » dans l’école publique, avec l’accord des socialistes. Loi qui fut ressentie très largement par les jeunes des quartiers populaires comme une loi discriminatoire visant la religion musulmane. J. Chirac avait réussi son coup : l’ensemble du mouvement social (associations féministes, syndicats, forces de gauches ou d’extrême gauche etc.) s’étripa pour ou contre la loi. Le CNDF risquait d’éclater dans ce climat hystérique. C’est pourquoi il ne se prononça pas sur la loi elle-même. Il organisa lors d’une rencontre nationale un débat approfondi sur la laïcité, les normes religieuses et le corps des femmes, le racisme et les discriminations pour aboutir à une position consensuelle. A la suite de cette réunion, une tribune fut publiée dans Libération le 27 janvier 2004 intitulée contre le racisme et pour les droits des femmes, signée par trois militantes Suzy Rojtman, Maya Surduts, Josette Trat.
La violence des invectives échangées sur cette question, entre féministes, n’a pas réussi à démoraliser Maya qui a continué à mettre toute son énergie contre la fermeture des maternités de proximité et le droit à la santé pour toutes et tous ou à organiser la solidarité avec la lutte des femmes dans les pays du Moyen orient qui se sont soulevés contre les dictatures comme en Tunisie ou en Egypte, en 2011. Nul doute que Maya aurait aimé être des nôtres dans les manifestations contre la loi El Khomri, ou sur la Place de La République. Nul doute qu’elle n’aurait pu s’empêcher de faire la leçon aux plus jeunes du haut de ses 79 ans, sans craindre de les agacer … Car Maya, cette grande gueule, n’avait peur de rien et est restée une militante passionnée par les débats et les mouvements sociaux, jusqu’à son dernier souffle.
Josette Trat
1 Travail, Genre et Société, n°29, en libre accès actuellement en hommage à Maya.
2 D’abord à Révolution, puis bien plus tard à la Ligue communiste révolutionnaire et enfin, à Ensemble.
3 Association dirigée par l’avocate féministe Monique Antoine dans laquelle se retrouvaient le Planning familial, des syndicalistes de la CFDT, différentes composantes de l’extrême gauche, des médecins des deux sexes etc. mais d’où étaient absents la CGT et le PCF.
4 Groupe d’études sur la division sexuelle et sociale du travail, Groupe de recherche du CNRS longtemps dirigé par Danièle Kergoat.
5 Comme nous le disait souvent Maya, c’était « Après la chute du mur de Berlin…». Pour une analyse plus détaillée du courant « féministe-luttes de classe » cf. Josette Trat (coordinatrice), Les Cahiers du féminisme, dans le tourbillon du féminisme et de la lutte des classes, éditions Syllepse 2011.